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Publié le 23 octobre 2025 par Claire Filliatre

L’arbitrage international : entre efficacité juridique et maîtrise du risque

Dans un contexte de mondialisation des échanges, les entreprises nouent des partenariats avec des acteurs situés sur plusieurs continents, négocient des contrats soumis à des droits différents, et exposent leurs opérations à des risques géopolitiques, réglementaires ou économiques difficilement prévisibles.

Lorsqu’un différend survient, le recours aux juridictions étatiques s’avère souvent inadapté : lenteur, complexité des notifications internationales, incertitude quant à l’exécution de la décision à l’étranger.

C’est dans ce cadre que l’arbitrage international s’est imposé comme une voie privilégiée de règlement des litiges commerciaux transnationaux.

Une justice neutre, choisie et adaptée au commerce international

Le premier atout de l’arbitrage international est sa neutralité.

Le recours à l’arbitrage est généralement anticipé en amont de tout litige, au stade de la négociation du contrat. La clause d’arbitrage, dite clause compromissoire, revêt à ce titre une importance déterminante.

Sa rédaction doit être particulièrement soignée : elle précise notamment le type d’arbitrage choisi (institutionnel, sous l’égide d’un organisme tel que la CCI ou la LCIA, ou ad hoc), la langue de la procédure, le nombre d’arbitres, le siège de l’arbitrage, ainsi que la loi applicable.

Une clause mal rédigée peut en effet compromettre la validité de la procédure ou générer des difficultés.

Lorsque le litige survient et qu’un arbitrage doit être engagé, les arbitres sont désignés conformément aux stipulations de la clause compromissoire ou, à défaut, selon les règles applicables de l’institution saisie. Ces arbitres sont en principe des praticiens aguerris du commerce international, choisis pour leur expertise dans le domaine concerné – qu’il s’agisse de l’énergie, de la construction, de la distribution ou des joint-ventures industrielles.

Leur connaissance des usages du commerce international et leur approche pragmatique de la preuve constituent souvent un facteur décisif de confiance pour les entreprises.

Cet espace de liberté contractuelle confère à la procédure une dimension véritablement internationale, détachée de toute influence étatique directe.

Une procédure souple, confidentielle et souvent plus rapide

L’arbitrage se distingue par une grande flexibilité procédurale.

Les règles de preuve, le calendrier des échanges ou la tenue d’audiences hybrides peuvent être adaptés au profil des parties et à la complexité du dossier.

L’objectif n’est pas d’imiter la procédure civile nationale, mais de bâtir un cadre pragmatique, centré sur l’efficacité.

Autre élément décisif : la confidentialité.

Contrairement aux décisions judiciaires publiques, les sentences arbitrales ne sont généralement pas publiées.

Les échanges d’écritures et les audiences se déroulent à huis clos.

Cela permet aux entreprises de préserver leur réputation, d’éviter la divulgation d’informations stratégiques ou de maintenir un dialogue discret dans un contexte de litige.

Une reconnaissance internationale de la sentence arbitrale rendue

L’efficacité de l’arbitrage international tient également à la portée de ses décisions.

Depuis la Convention de New York du 10 juin 1958, ratifiée par plus de 170 États, les sentences arbitrales peuvent être reconnues et exécutées presque partout dans le monde. C’est un avantage décisif : une entreprise française peut faire exécuter une sentence rendue à Paris contre une société indienne, américaine ou algérienne, avec une sécurité juridique bien supérieure à celle qu’offrirait un jugement national.

En France, cette reconnaissance passe par la procédure d’exequatur, qui confère force exécutoire à une sentence arbitrale étrangère.

Le juge français ne réexamine pas le fond du litige : il vérifie seulement que la décision respecte les exigences formelles et l’ordre public international, conformément aux articles 1514 et 1515 du Code de procédure civile.

Une fois l’exequatur accordé, la sentence devient un titre exécutoire permettant d’engager toutes mesures d’exécution forcée.

Le tribunal judiciaire de Paris est aujourd’hui compétent pour connaître de ces demandes en matière d’arbitrage international.

Les limites de l’arbitrage international

L’intérêt de recourir à l’arbitrage dans le cadre d’un litige international ne doit pas masquer certaines contraintes. Son coût, tout d’abord, est loin d’être négligeable.

Aux honoraires des conseils s’ajoutent les frais d’institution et les honoraires des arbitres, souvent proportionnels au montant en jeu.

Pour un litige significatif, la procédure peut représenter plusieurs centaines de milliers d’euros.

Sa durée, ensuite, n’est pas toujours inférieure à celle d’un contentieux judiciaire : un arbitrage complexe peut s’étendre sur deux à trois ans, notamment lorsque plusieurs expertises techniques sont nécessaires.

En outre, la sentence arbitrale n’est pas susceptible d’appel : seul un recours en annulation limité aux vices de procédure est possible.

Cette absence de double degré de juridiction, gage de rapidité, peut être perçue comme une rigidité lorsqu’une erreur d’appréciation survient.

Enfin, l’exécution de la sentence, bien que facilitée par la Convention de New York, peut rencontrer des obstacles lorsqu’elle vise un État souverain, une entreprise publique ou un partenaire récalcitrant disposant d’actifs protégés à l’étranger. Les mêmes difficultés d’exécution seraient cependant rencontrées voire accentuées dans le cadre d’une procédure judiciaire classique.

L’arbitrage demeure la voie privilégiée pour le règlement des litiges internationaux, offrant une garantie accrue de sécurité et de fiabilité de la justice.